Hopitalebonjourdudocteur (deuxième partie)
Sortant de chez le gaucher, je posais délicatement mes
fesses sensibles sur la selle de ma moto et me dirigeais vers la capitale afin
de récupérer un accessoire chez un concessionnaire. Passé le pont de Sèvres j’empruntais
la grande avenue qui mène à la porte de Saint Cloud.
Mais pourquoi une gamine traversa en courant alors que le
feu était au vert ? Tiens c’est une question que je ne lui ai pas posée.
Bref me voilà avec en ligne de mire un petit corps affolé et de chaque côté de
la chaussée des piétons qui hurlent. Pas beaucoup de choix, soit je fais un
strike dans les gens qui attendent sur le terre plein central, soit je shoote
la môme, soit je prends place dans la poussette jouet qu’elle pousse. (Ben oui
une poussette comme son nom l’indique ça se pousse). Tant pis pour la poupée,
pas le temps de peser le pour ou contre, ça va trop vite et en pas plus d’une
seconde la roue avant embarque le petit véhicule à traction humaine.
Tout aurait été pour le mieux si cette foutue poussette
n’était pas restée coincée privant la roue avant de rotation et envoyant la
bécane et moi au tapis qui était moins vert que le feu.
Me voilà donc en vrac sur l’asphalte, mais conscient, vu
la faible allure à laquelle je suis tombé, que je n’avais rien de cassé, tout
juste quelques éraflures aux genoux et un jeans à raccommoder. J’allais me
relever quand une horde de gens m’entoure en me signifiant de ne pas bouger que
les secours vont arriver. Parmi tous ces braves, y’en a quand même qui bavent
en vouant tous ces fous de motards au bûcher. Perso je me fiche bien de ces
connards et sollicite une charmante fliquette qui se penche sur moi, d'avoir des
nouvelles de la gamine. « Elle n’a rien » me rassure-t-elle. Parfait
alors maintenant on me fait un peu de place et on me laisse ramasser ma
machine, regarder les dégâts et ensuite faire un constat, du moins c’est ce que
j’envisageais.
« Nous avons appellé police secours »
m’annonce un barman venu sur les lieux et donc coupable d’un abandon de poste.
J’ai beau dire que ça va bien, il faut absolument qu’on me fasse croire que ça
va mal. Quelques minutes plus tard voilà le fourgon toutes sirènes hurlantes,
suivit des pompiers. Une civière rien que pour moi et une autre pour la gamine
alors que son seul chagrin était de constater que sa poussette était transformé
compression de César et ne roulerait plus. Mine de rien j’avais inventé les
transformers et quelqu’un ma piqué l’idée.
Me voila donc embarqué dans le fourgon de la police,
direction l’hosto. Durant le court voyage un policier me pose des questions en
remplissant un procès verbal et m’indiquant qu’une fonctionnaire de police
témoin à déclaré ma non responsabilité dans cet accident. C’est plutôt bien me
direz-vous, d’accord mais moi j’avais bien d’autres inquiétudes et sitôt arrivé
aux urgences, je m’égosillais d’expliquer à deux infirmières que je me portais
même mieux qu’avant l’accident.
Autant pisser dans un violon qui d’ailleurs aurait pu être
ma destination, allez savoir avec la police…
Je me retrouve allongé sur une table d’auscultation. Un
gars arrive et me retire mon casque avec délicatesse en me demandant si je n’ai
pas mal derrière la tête, si je n’ai pas la vue troublée, des nausées etc. Un
remake du malade imaginaire, mais sans la saignée, on n’en n’est plus là quand
même. Vu que je n’ai mal nulle part et que le toubib dit ne pas m’envoyer à la
radio car il pense comme moi, je souffle de soulagement et me vois déjà
franchir les portes de l’établissement dans le sens inverse.
Zélé le médecin, pour être certain et n’avoir aucun
regret, il me demande de me déshabiller pour contrôler et palper mes
articulations. Là je suis mal ! C’est sûr je devais être un peu livide,
mais bon, je ruse. Je retire le blouson, la chemise, le maillot et présente mes
bras et mon torse. Le toubib me plie les coudes un peu dans tous les sens et me
demande ce que je ressens. Ensuite il me tâte les côtes et me pose la même
question. Jusque là tout va bien, mais ça se gâte quand il me demande de
retirer mes bottes et mon jeans car lui et l’infirmière avaient remarqué la
petite auréole rougeâtre qui marquait le genou râpé du vêtement.
Vous pouvez toujours dire que même pas mal, que c’est
juste une égratignure de rien du tout, la médecine est sourde et surtout
curieuse de voir par ses propres yeux alors que les miens ne sont pas plus
sales.
Je ne me souviens plus de tout ce qui m’est passé par la
tête, mais je ne doute pas de choses les plus absurdes du genre : je saute
à travers la fenêtre comme Luky Luke, Je crie au viol, Je dis que j’ai la
syphilis, Je dis que de baisser sa culotte devant des étrangers c’est impoli ou
je demande un avocat. En attendant et vulgairement parlant, je suis dans la
merde et l’infirmière prépare déjà de quoi désinfecter mon bobo.
Au fond de l’impasse, je ne pouvais rien faire d’autre
que d’obtempérer, j’ai donc ôté mes bottes et timidement baisser mon pantalon
que le toubib à fini d’enlever en le jetant au dessous de la table. Mon visage
me piquait et je me collais dos au simili cuir. Le médecin a regardé
l’écorchage et fait signe à l’infirmière de s’en occuper. Pendant ce temps il
avait enlevé courageusement mes chaussettes et tripatouillait mes chevilles.
Un beau pansement qu’elle m’avait fait la dame que j’ai
certainement remercié d’un sourire crispé.
« Vous n’avez pas mal au
dos, retournez-vous ! » M’a demandé le toubib.
Je crois qu’à ce moment là j’en aurais chialé. J’étais
foutu, mort, deux fois trois fois et enterré autant ; Justement c’était
l’année des roses, ça change des chrysanthèmes.
Ben oui que je me suis retourné, vous auriez fait quoi à
ma place ? Pourquoi n’avais-je pas mis un caleçon tiens ?
Evidement qu’un slip ça ne couvre pas toutes les fesses, évidement
que la trempe que j’avais reçu il y a une heure ou un peu plus avait imprimée
des marques très explicites surtout que le gaucher avait la main lourde.
J’avais le nez enfoncé dans le revêtement de la table et
les yeux fermés. Derrière moi ce fut le silence pendant quelques secondes, puis
le toubib s‘est adressé à l’infirmière. Je l’entends encore comme si c’était
hier.
« Alors ça, ce n’est pas causé par la chute de moto. »
A-t-il dit d’un ton persifleur.
Je ne peux vous décrire ce que je ressentais ;
l’anéantissement, la mortification, un grand trou, une explosion interne de
tous mes neurones et bien pire encore.
Une serpillère sur cette table d’auscultation aurait
surement été plus digne que moi.
Encore heureux qu’il n’a pas posé de question sur le
sujet parce que je crois que pour moi c’était l’arrêt cardiaque.
Le toubib m’a plié les jambes, a pressé sur mon bassin, a
tâté mes cervicales et a annoncé que c’était bon. L’infirmière m’a dit de me rhabiller
et d’attendre en salle ma feuille d’hospitalisation.
J’étais pitoyable et quand je suis sorti de cette
minuscule pièce en faisant un simple signe à l’infirmière parce que je ne me
sentais plus de parler, elle m’a gratifié d’un petit sourire.
Beaucoup plus tard, racontant l’anecdote au gaucher et à
certains partenaires, j’entendais souvent dire que les médecins et les
infirmières en voyaient de toutes les couleurs et que les marques d’une bonne
fessée devaient être relativement minimes, voir banales par rapport aux restes.
C’est sans doute vrai, mais c’est facile de parler quand on n’est pas dans la
peau du gars qui est sur la table d’auscultation.
Comme d'habitude, j'adore tes déboires avec modération! Tu as vécu de ces trucs... Et comme d'habitude, je suis partagé entre me reprocher d'être trop sage et le soulagement de n'être pas tombé dans une situation à problème.
RépondreSupprimerAu passage, j'aime bien tableau avec les pinces de crabe qu'on voit dans le fond de l'une des illustrations de la première partie.
Simon
C'est marrant ça, beaucoup me disent que j'ai vécu des trucs pas possibles. Ça n'a rien d'extraordinaire, ce sont des anecdotes de la vie et quand je regarde autour de moi et j'entends des amis(es) relater des espaces de leur vie ou de leurs jeux, c'est au moins au même niveau voir parfois plus encore. La seule différence, c'est qu'ils ne l'écrivent pas toutes et tous sur des blogs ou des forums.
SupprimerDes anecdotes comme celle là qui sont des souvenirs relativement lointains, je n'en n'ai plus d'ailleurs, c'était la dernière aussi croustillante. Non pas que je n'ai plus rien vécu, mais que c'est beaucoup moins original à moins de faire un gros brodage qui ôterait de beaucoup la réalité. En revanche j'ai quelques trucs assez pétillants plus récents comme le récit que j'avais fait du piège tendu par Ellie, Iris, Delie et Agramant.
Si on compare les anecdotes racontables à l'ensemble des rencontres et des jeux vécus depuis mes vingt ans, ne représentent qu'un petit pourcentage.
Quand je lis vos aventures, Constance et Simon, je pourrais aussi dire que c'est extraordinaire et quelque part ça l'est, mais cela reste des espaces anecdotiques d'une vie et même de deux vies. Ce qui fait la différence, c'est qu'elles sont racontées sur un blog alors que d'autres qui vivent des tas de trucs également, comme la plupart des humains, ne le diffusent pas pour des raisons qui leur sont propres.
Pour ce qui est de la situation à problème ; effectivement sur l'instant j'étais mal, mais quand on réfléchit bien à ce genre de situation, si elle est passagèrement mortifiante, il y a quand même bien pire. C'est juste un coup de malchance un jour où il ne fallait pas et puis l'important quand on y pense, c'est que la gamine n'avait rien. Le cas inverse aurait été bien plus dramatique que montrer en partie une paire de fesses récemment fessées.
Il ne fait aucun doute que j'ai eut et à moindre mesure toujours, une existence assez mouvementées dans le bon sens du terme. J'ai beaucoup voyagé en couchant souvent chez l'habitant dans des pays magnifique où d'ailleurs il serait aujourd'hui pour certains, risqué d'y foutre les pieds, j'ai rencontré et rencontre toujours un bon nombre de personne dans le fantasme de la fessée, j'ai fait des tas de choses différentes au niveau artistique, bref j'ai rempli et je pense encore pendant quelques année, mon temps au mieux de mes envies. Je ne suis pas un cas unique et heureusement d'ailleurs. Ce n'est pas un privilège, c'est quelque part un peu de chance, mais aussi beaucoup de désirs et de vouloir. Alors effectivement, quand on marche, roule, navigue, vole et qu'on rencontre un grand nombre de personne, on ne peut qu'accumuler les anecdotes, du moins ça me parait logique. Ensuite, le tout et de savoir les écrire.
Et tu sais le faire... Comme C & S, je suis scotché par tes anecdotes et je te remercie de nous les faire partager d'aussi poignante façon... J'ai eu l'estomac liquéfié en attendant que le médecin me fasse le pantalon... Bien joué...
Supprimer(et oui, aussi, comme eux, j'en viens à regretter de ne pas les avoir vécues... Pas spécifiquement celle-ci, par exemple, mais de ne pas avoir donné corps à mes fantasmes plutôt que de me contenter de jeu solitaire. Il est sûr que les anecdotes en auraient découlé... M'enfin, j'ai vécu autre chose, bien sûr, mais tout de même...)
Cher MLKKLM, ne regrette rien car si on se met toutes et tous à regretter ce qu'on n'a pas fait, on fini par oublier ce qu'on a fait.
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