Il y a des jours ou je suis comme un papier froissé que
le vent emporte sans jamais donner de destination. Mon esprit va, virevolte
dans le courant d’air des rues de ma vie consommée et roule sur le pavé des
chaussées qui ne conduisent finalement qu’au même endroit que tout le monde.
Ce sont des moments où mes pensées s’emmêlent et s’enfilent
sans ordre. On ouvre l’album d’mages qui pâlissent et parfois on s’arrête sur
un détail comme la photo d’une main. Qu’est-ce qu’une main au juste sinon
l’outil le plus performant en notre possession ?
Délires d’un instant je m’amuse à relever toutes celles
qui m’ont touché, caressantes, consolantes, généreuses, ou plus rudes… Mmmmm
justement à celles féminines ou masculines un brin libertines, non celles qui
m’ont jadis puni pour quelques pas franchissant la ligne que je n’avais pas
tracée, mais celles que timidement plus tard j’avais sollicitées ou que tout
aussi sobrement, j’avais laissé faire. Réminiscences qui me chatouillent entre
les jambes et que je sens encore, même éloignées, incendier mes rondeurs
dénudées.
De chauds et excitants souvenirs, le bruit des peaux qui
se heurtent, le fourmillement brûlant imprimé et pénétrant qui circule dans mes
chairs et galope dans mes veines jusqu’à l’extrême de mon pénis bandé sur la
cuisse d’un corps complice qui d’un autre bout, tiens la main qui va et vient.
Je sens encore sur ma joue une larme chatouiller puis, en
pointe de menton hésiter avant de lâcher prise et tomber sur le sol en y
laissant la tache humide éclaté et difforme, comme une signature éphémère d’un
tourment désiré.
Pour de vrai un faux écolier, un fils, un coupable de
tout et surtout de petits riens, un voleur de pommes qui n’était pas mûres aux
branches d’un cerisier, un condamné à la question, un bad boy, un tricheur et
bien d’autres choses encore. Tant de rôles déguisés puis dévêtus, humilié, puni
et chaque fois pardonné d’avoir été un instant sans jamais l’être.
De la jouissance la plus intense à la déception la plus
glacée, je n’ai que le souvenir d’une liaison entre deux ou parfois plus qui ne
se ternie d’aucun regret.
A toutes ces mains amis que j’ai serrées avant qu’elles me
corrigent, à toutes ces mains dont je n’ai jamais lu les lignes, mais qui de
rouge ont été imprimées superposées sur mes fesses offertes, à toutes ces mains,
même les plus lointaines, aux départ de l’âge adulte, qui m’ont fait du mal
pour finalement engendré un bien si mystérieux, je leur dit merci. Merci, mais
pas seulement à elles, merci aussi aux bonnes âmes qui les commandaient.
Je regarde ma main droite, ma propre main… Elle n’a
jamais signé de reconnaissance de dette parce que dans ce fantasme nous ne
sommes pas des usuriers. Je regarde ma main en me demandant si un jour elle
pourra aussi offrir tout ce que les autres m’ont donné.